RWANDA: FEEDBACK SUR LA CÉRÉMONIE DE COMMÉMORATION A LA MÉMOIRE DE TOUTES VICTIMES RWANDAISES – RIBARA UWARIRAYE

Ce 30 mai 2020, sur YouTube, a eu lieu un talk-show en direct intitulé Ribara – Uwariraye – Twinegure. Ce talk-show revenait sur l’accueil chaleureux pour les Rwandais, froid et haineux pour les extrémistes du pouvoir du FPR de la cérémonie de commémoration des toutes les victimes rwandaises qui a eu lieu 25 avril 2020 en ligne. Une rescapée du génocide perpétré contre les Tutsi non reconnue par le FPR, qui l’a labélisée de «fake survivor », Louise Uwacu s’est démarquée en acceptant cette étiquette et en rétorquant au FPR que pour elle au Rwanda il y a eu aussi « une Fake Victoire », « une Fake Liberté », « Un Fake succès économique » , une « Fake liberation »… Dans cet article vous trouverez la synthèse de l’émission.

Mireille Abewe, Aimée Bamukunde, Claude Gatebuke, le Dr Innocent Justice Ndagijimana, Constance Mutimukeye, Jean Ngendahimana, Denise Zaneza et Delphine Yandamutso qui ont participé à la cérémonie de commémoration renouvelaient leur participation à l’émission et à eux se sont ajoutés les nouvelles convives : Amb Jean-Marie Vianney Ndagijimana, Eugène Nsanzimana , Lydie Ujeneza et Louise Uwacu.

La première intervenante était Mireille Abewe, qui a décrit comment la communauté des rescapés [NDR : les rescapés reconnus par le FPR] l’avait désavouée en lui disant « qu’elle était une honte pour la communauté » parce qu’elle avait communié avec d’autres Rwandais dans les cérémonies de commémoration à la mémoire de toutes les victimes rwandaises [RIBARA UWARIRAYE et MPORE].

Cette orpheline de père tué lors du génocide considère que sa douleur a la même valeur que celle des autres rwandais qui ont perdu les leurs dans les différents événements tragiques que le Rwanda a connus. De lors elle a appelé les Rwandais à faire preuve de tolérance et de compassion envers les autres car ces évènements tragiques ont frappé tous les Rwandais. Elle a expliqué qu’elle ne connaissait pas à titre personnel les personnes présentes dans l’émission et que ce qui les unit est « leur amour pour le Rwanda ».

Beaucoup d’intervenants sont revenus sur la lettre publiée par la Commission Nationale de Lutte contre le Genocice (la CNLG) publié le 25 mai 2020. Cette institution nationale a en principe l’objectif de lutter contre le génocide ou la propagation de l’idéologie du génocide, mais en réalité est devenue un vecteur de l’idéologie de la haine ethnique.

En effet la CNLG n’a pas hésité à dire que la majorité des personnes qui ont préparé la cérémonie Ribara Uwariraye [NDR : ces personnes avaient moins de 18 ans en 1994 et parmi elles il y avait des rescapés du génocide perpétré contre les Tutsi] a les « des parents qui ont porté une responsabilité directe ou indirecte dans la planification et la mise en œuvre du Génocide ….» et a démontré que Claude Gatebuke, un activiste américain pour le respect des droits de l’Homme, rescapé du génocide, est un “fake survivor”.

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La démonstration de la CNLG a consisté en l’étalage public du supposé arbre généalogique de Gatebuke et de conclure que «dans tous les postes qu’il a occupés [N.D.R. le père de Claude Gatebuke] il n’a jamais été Tutsi et son fils prétend l’être dans le seul but de nier le génocide perpétré contre les Tutsi ». Les intervenants ont tous exprimés leur désarroi face à la diffusion par la CNLG des tels propos.

Claude Gatebuke a trouvé hors normes que l’on puisse dire d’une personne, à qui pendant le génocide l’on a demandé de creuser sa propre tombe, que c’est un faux rescapé alors que ceux qui n’étaient pas au Rwanda sont considérés comme des rescapés au simple motif qu’ils appartiennent à ce que l’on a considéré comme l’ethnie tutsi, pour lui c’est vraiment désolant. Il a bien expliqué qu’être rescapé vient de l’expérience que l’on a vécue celle d’avoir échappé à la mort.

Il a souligné qu’ être rescapé est une expérience douloureuse à porter et que ce n’est pas au FPR ni à la CNLG de distribuer les étiquettes de qui est rescapé ou ne l’est pas. Pour ceux qui disent que la commémoration des toutes les victimes ne peut pas avoir lieu dans la période de commémoration du génocide perpétré contre les Tutsi, il leur a demandé d’envoyer leurs doléances au FPR qui n’a pas pris de pause en massacrant des Rwandais durant cette période, il a donné l’exemple des crimes de masse commis par les troupes de l’APR à Mbandaka, à Ndera, à Kibungo, à Kibeho…

Lydie Ujeneza a dit avoir salué le courage des personnes qui ont témoigné de leur vécu douloureux pendant la cérémonie qui a eu lieu en avril, pour elle c’est important de raconter son histoire sans demander à qui que ce soit la permission et sans contrainte aucune. C’est une façon de se libérer, de se reconstruire et donner l’exemple et le courage à ceux qui n’osent pas franchir le pas. Elle a appelé les Rwandais à comprendre que leurs compatriotes ont le droit de commémorer les leurs selon leur volonté.

Ambassadeur Jean-Marie Vianney a entre autres expliqué qu’avant les débuts d’Ibuka Bose, une fondation dont un des objectifs est de commémorer toutes les victimes rwandaises, les porteurs de l’initiative avaient demandé à Ibuka de joindre leurs efforts pour la commémoration à la mémoire de toutes les victimes, pour eux l’action d’Ibuka était à saluer cependant il fallait la compléter en donnant une place à toute les victimes. Marcel Kambanda, ancien présidente d’Ibuka France, lui a répondu que « Nous allons commémorer les nôtres tués lors du génocide perpétré contre les Tutsi et vous les vôtres, c’est-à-dire les victimes hutues ». Ibuka Rwanda et Belgique ne leur ont jamais répondu.

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Aimée Bamukunde, rescapée des crimes de masse commis contre les réfugiés en RDC, a souhaité répondre à ceux qui ont dit, après son témoignage, que ceux qui sont morts en RDC ont été emportés par la dysenterie ou par la guerre, elle leur a répondu que qu’elle a survécu les crimes de masses qui consistaient à rassembler une foule de réfugiés et de tirer sur elle, le Mapping Report a bien stipulé que les massacres des réfugiés hutus sont des crimes de masse[N.D.R. « On ne peut pas nier que des massacres de caractère ethnique ont été commis, dont les victimes sont en grande partie des Hutus, Rwandais, Burundais et Zaïrois. De l’avis préliminaire de la mission conjointe, certaines de ces allégations [certains de ces massacres présumés] pourraient constituer des actes de génocide » la phrase du Mapping Report».

Eugène Nsanzimana est un jeune un membre de l’association ABUSAMIHIGO, une initiative fondée après l’assassinat du chanteur rwandais Kizito Mihigo, lui et ses camarades se sont donnés l’objectif de continuer le combat de Kizito Mihigo pour la réconciliation rwandaise. Il a encouragé les Rwandais à ne pas tomber dans les pièges des extrémistes de toutes les supposées ethnies rwandaises en vue d’atteindre la véritable réconciliation rwandaise.


Louise uwacu

Louise Uwacu, la dernière invitée à s’exprimer, a dit qu’après avoir supporté et diffusé la commémoration de toutes les victimes rwandaises RIBARA UWARIRAYE, le régime de Kigali s’en est pris à elle. En effet les autorités rwandaises ont utilisé les médias pro régime pour dire que c’est une “fake survivor”. Avec le dynamisme et l’audace que l’on lui connait, elle a accepté ce label de “fake survivor” et a informé les Rwandais qu’ils ont des “fake identités, des fake hutus, des fake tutsi et des fake twa) dans la mesure où personne n’a jamais pu expliquer l’origine de ces supposées ethnies. Pour elle ces fausses identités sont à la base des tueries de masse que les Rwandais commettent sur d’autres Rwandais.

Elle préfère se voir comme un témoin racontant le génocide, un statut qu’elle considère au-dessus de celui du rescapé, en expliquant qu’elle n’a jamais pu comprendre comme une partie de personnes pouvaient nier qu’il y a eu un génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda dans la mesure où elle n’a jamais cessé de témoigner comme elle a survécu plusieurs fois aux barrières en niant ne pas être une tutsie.

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En acceptant ce label, elle en profité pour rappeler quelques réalités rwandaises, avec ses propres mots, pour elle : « une victoire qui se fait sur le dos d’un million de vies rwandaises est une fake victoire ». Elle a comparé le régime du FPR à un homme qui violerait une femme, par la suite l’obligerait à l’épouser et exigerait d’elle de clamer par tout elle l’aime (les élections rwandaises). Elle n’a pas hésité à donner l’exemple de ce qui est faux au Rwanda : des fake rescapés, un fake système éducatif, une fake Liberation, une “fake démocratie”….

Denise Zaneza a clôturé le talk-show en demandant aux Rwandais, surtout les jeunes, de s’approprier leurs histoires dans la mesure où « utazi iyo ava, aba atazi iyo agana », l’équivalent de la citation de Winston Churchill : «Un peuple qui oublie son passé n’a pas d’avenir ». Pour ceux qui sont sur les réseaux sociaux, elle leur a dit qu’ils n’étaient pas faits que pour poster les photos, qu’ils pouvaient aussi les utiliser en parlant pour ceux qui ne peuvent pas le faire. Ses confrères et elle vont continuer à dire la vérité que le FPR veut taire, ils vont aussi continuent à planter les graines d’amour et qu’ils demandaient aux Rwandais de les aider.

Pour le public rwandophone l’intégralité du talk-show se trouve:

Opinion de l’auteur

La lettre de la CNLG est de l’extrémisme le plus abjecte. Des personnes comme Sonia Rolland, Gaël Faye, Jessica Mwiza peuvent être vues comme des rescapés ou enfant de rescapés du génocide et c’est tout à fait normal. Si les allégations de la CNLG sur l’arbre généalogique de Claude Gatebuke étaient vraies, il aurait en commun avec ces personnes d’avoir un père qui n’a jamais appartenu à la supposée ethnie tutsie. Dans un cas cela ne pose aucun problème à la CNLG dans l’autre cas cela devient sa principale préoccupation, à titre personnel cette lettre est la preuve formelle que le seul élément qui dérange la CNLG et le mélange du sang Tutsi avec le sang des autres supposées ethnies ! Pourtant les Rwandais sont un même peuple qui partage la même langue et la même culture ! Qu’une institution nationale fasse preuve de l’extrémisme le plus abjecte sur la base ethnique et propage la haine ethnique est inquiétant pour l’avenir du Rwanda !

Constance Mutimukeye