Rwanda-Burundi:Pourquoi Kigali cherche à normaliser des relations tumultueuses avec Gitega?

Depuis quelques temps, Kigali multiplie les gestes allant dans le sens de normaliser les relations tumultueuses avec Gitega. Quelles peuvent être les raisons derrière cette attitude ? Analyse.

Le premier geste d’apaisement remonte au début de cette année. Dans une conférence de presse, Dr Vincent Biruta, alors fraîchement nommé à la tête de la diplomatie rwandaise, annonçait que son pays était prêt pour un dialogue avec le Burundi. Cependant, il semblait douter de la volonté de Gitega. Pour lui, les autorités burundaises demeuraient toujours dans la logique de salir son pays.

Quelques mois plus tard, lorsque le général Evariste Ndayishimiye est élu, le voisin du nord est parmi les premiers à le féliciter. Encore une fois, les autorités rwandaises n’ont pas manqué de (re)glisser dans leur message leur volonté de renouer les relations d’entente avec notre pays.

Il s’en est suivi un événement malheureux pour le Burundi : Pierre Nkurunziza, président sortant, décède inopinément suite à un arrêt cardiaque. Face à cette situation, le voisin du nord a compati à la douleur du peuple burundais. Il a adressé ses condoléances et a décrété un deuil national et les drapeaux ont été mis en berne jusqu’au jour des funérailles.

De son vivant, le président Nkurunziza avait exigé la tenue d’un sommet spécial des chefs d’État de la région pour se pencher sur le « conflit ouvert » avec son voisin allant jusqu’à le qualifier d’« ennemi ». Son appel n’avait apparemment pas trouvé d’écho. Beaucoup d’observateurs ne manqueront pas de souligner le manque d’intérêts affichés par ces chefs d’État de la région pour ce conflit.

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Récemment, le numéro Un rwandais a reformulé les mêmes vœux pacifistes dans une séance d’échanges avec ses followers sur les réseaux sociaux. Pour lui, il faut tourner la page pour permettre à la population des deux pays de circuler librement.

Pourquoi ce revirement de Kigali ?

Le pouvoir de Kigali est très soucieux de son image. Entretenir donc de tumultueuses relations avec ses voisins est une mauvaise publicité pour ses affaires. Le « Visit Rwanda » prôné par Kigali devient moins convaincant (ou en ressort en tout petit peu écorné). D’autant plus que c’est paradoxal de se montrer hospitalier envers des étrangers lointains et hostiles envers ses voisins.

Autre donne. Le président Kagame est parmi les principaux instigateurs de la zone du libre-échange continentale africaine (Zlec). Un idéal qui lui tient à cœur mais qui est mis à mal par la fermeture des frontières avec ses voisins. En effet, la circulation des biens et des services entre le Burundi et le Rwanda est presque paralysée.

Par le passé, le changement du chef de l’exécutif de l’un des deux pays a apporté un souffle nouveau dans les relations bilatérales. En 1973, les présidents Micombero et Kayibanda étaient à couteaux tirés. C’est le coup d’État de Juvénal Habyarimana qui est venu décrisper la situation. Ce dernier a fait une visite officielle, juste après sa prise de pouvoir, pour marquer la fin des mésententes.

Actuellement, une telle initiative venant de l’une des deux pays serait salutaire. Elle sonnerait sans doute le début du dégel. Une bonne cohabitation poserait les premiers jalons pour un retour des réfugiés de Mahama. Ce qui se trouve être une des priorités des nouvelles autorités de Gitega.