L’incertitude sur les frontières de la République démocratique du Congo et ses voisins est l’une des causes de la guerre d’occupation de la RDC depuis les années 1996-2022. Amani SANGARA NTALE, Analyste indépendant dans son analyse sur l’Aperçu historique sur les frontières de l’EIC (Etat Indépendant du Congo) montre que ceux qui disent aux Nations unies et à la communauté internationale qu’ils ont de terres à réclamer à la RDC se trompent énormément. Par contre ce n’est que la RDC qui devait les réclamer aux pays voisins dont (l’Ouganda, le Rwanda et la Tanzanie).
Depuis la convention de Bruxelles du 8 novembre 1884 reconnaissant les frontières de l’Etat Indépendant du Congo jusqu’à l’arrangement de Londres du 3 février 1915 relatif à la frontière Mont Sabinio-Lac Albert-Crête Congo Nil, les frontières du pays ont connu une histoire longue et tumultueuse dans leur démarcation. En se référant sur la carte ci-dessous, les frontières indiquées dans la déclaration de neutralité notifiée le 1er août 1885 aux puissances signataires de l’Acte général de Berlin, on ne peut s’empêcher de dire que depuis 1894 jusqu’à nos jours, les limites du Congo démocratique sont demeurées stables.
Vis-à-vis du Ruanda-Urundi (possession allemande dans Afrique Orientale Allemande) qui deviendra territoire sous mandat-belge, la fixation de la frontière datait déjà de la convention du 8 novembre 1884. Avec l’ancienne possession allemande, devenue Tanzanie et autres, le tracé frontalier facilité par la présence du lac Tanganyika n’a pas eu besoin d’être déterminé. Elle n’a connu que des explications, des mises au point de détails lors de la convention de Bruxelles du 11 août 1910, approuvée par la loi belge du 4 juin 1911.
L’Est de l’EIC au cœur des rivalités et des tensions militaires et diplomatiques entre la Belgique, l’Allemagne et l’Angleterre 1900-1911
En revenant sur la carte ci-dessus, surtout en rapport avec le territoire contesté; Signalons que l’occupation proprement-dite a démarré avec la mise sur pied ou l’établissement du territoire de la Ruzizi en 1900. Une occupation limitée fut réalisée encore entre 1910 et 1911 à la suite d’un différend aux frontières avec l’Allemagne. En 1910-1911, les frontières définitives de l’Etat du Congo étaient ainsi fixées. Le Congo a perdu certaines portions territoriales dont : le territoire de Shangugu et une partie du lac Kivu cédés au profit du Rwanda, une partie du lac Albert et Edouard cédée à l’Ouganda et une partie du lac Tanganyika cédée à l’Afrique orientale Allemande comme vous pouvez le constater sur cette carte. L’ile d’Idjwi, Bobandana et Goma sont restés sans modifications.
Source:https://www.congo-autrement.com/page/devoir-de-memoire/congo-belge-l-epineuse-question-de-l-esclavage.html
Signalons aussi qu’entre 1885 et 1888, la grande partie du pays n’était nullement contrôlée. Ce qui a poussé les esclavagistes Zanzibarites de Tippo Tip d’établir une présence forte dans l’Est et le Nord du territoire. Pour boucler le processus, le roi Léopold II lança l’assaut contre les Arabo-Swahili à l’Est en 1890. C’est après leur défaite en 1895, que la pénétration et l’occupation de territoires cédés eurent lieu. Mais, on ne peut pas ignorer que les commerçants arabo-swahili et Soudanais avaient précédés les explorateurs occidentaux et les fondateurs de l’EIC.
Englave de Lado
Sans oublier aussi « qu’un territoire situé au Soudan a bel et bien fait l’objet d’une tentative de colonisation entreprise par le roi Léopold II, il s’agit du Soudan léopoldien, plus connu sous l’appellation d’Englave de Lado, qui aurait pu de ce fait devenir plus tard une colonie belge ». C’est en 1906, qu’au Nord-Est, un accord fut signé avec l’Angleterre. Les expéditions léopoldiennes de 1894 ont abouti aux accords avec la France à l’établissement de la frontière du Nord entre l’EIC et le Centre Afrique. Quant à la convention du 25 mai 1891 avec le Portugal, une frontière avait été tracée entre l’EIC et l’Angola. Des expéditions au Katanga pour contrer l’expansion du groupe de Cecil Rhodes devraient affronter aussi la résistance locale, celle de M’Siri. C’est en 1894 qu’un accord fut conclu avec l’Angleterre et cette question des frontières du Sud-Est de l’EIC avec la Rhodésie fut réglée. Le tracé des frontières de l’Etat Indépendant du Congo ne figure pas dans l’Acte général de Berlin. « Le Congo est tel que nous le connaissons depuis 1910 et 1911 et non pas depuis 1885 ».
Didier AMANI SANGARA NTALE
Notes :
Jean Stengers, « Léopold II et la rivalité franco-anglaise en Afrique (1882-1884) », in Revue Belge de Philologie et d’Histoire, 1969, vol. 47, n°2, pp. 428.
« République Démocratique du Congo. Territoire-Admninistration » (https://www.droitcongolais.info/-1b-subdivision-rs-12-13–territoire-legislatif-.html).
La remise en cause des frontières africaines : le cas de la RDC/ Mémoire de licence en relations internationales, UNIKIN, 2012. Section « De la constitution d’un Etat : tracé des frontières ». Lire aussi Mbonyubwabo Muzinge, Histoire des frontières du Zaïre. Mémoire, Département d’Histoire, ISP-Bukavu, 1974.
Mbonyubwabo Muzinge, Histoire des frontières du Congo. Mémoire de licence, Département d’Histoire, ISP-Bukavu, 1974.
Soudan léopoldien (1894-1903)- Les Armoiries du Congo de 1877 à nos jours, Patrick Pierloz, 2017.
Lire aussi André Lederer, « Incident de frontière au Kivu », in Civilisations 41 (1993), pp. 415-426.
Divisions et subdivisions territoriales de la colonie, Boma, le 1er mai 1909, pp. 21-22.
Pour plus de détails, lire Khonde Ngoma Di Mbumba Côme, Boma. 1ère capitale de l’Etat Indéendant du Congo (1885-1908). Paris, L’Harmattan, 2005.
Pour plus de détails voir, Bulletin Officiel de l’Etat I dépendant du Congo, Année 1885, n°2 : Organisation du Gouvernement (Léopold II, Laeken, 30 octobre 1885) ; « Coup d’œil général sur l’organisation politique et administrative de l’Etat Indépendant du Congo », in Les Codes du Congo (deuxième édition), 1892 ; Félicien Cattier, Droit et Administration de l’Etat Indépendant du Congo (1898). Relié- Editeur : Kessinger Publishing, 18 avril 2010 ; Louis De Clerck, « L’organisation politique et administrative de l’Etat Indépendant du Congo », in L’ordre juridique colonial belge en Afrique centrale. Eléments d’Histoire. Bruxelles, Recueil d’études, 2004, pp. 121-128.