Par Didier Amani SANGARA NTALE, Analyste indépendant.
Au Congo Kinshasa, le mot balkanisation ou l’annexion du Kivu au Rwanda aux yeux des congolais, c’est une chose impossible. C’est vrai, le prouver selon le découpage territorial, semblerait être de la folie et pourtant, elle est de fait et réelle.
Si on essaie de faire une analyse de la stratégie du chaos implantée en RDC, l’ex Zaïre depuis 1996, vous allez voir que le commandement ou la gestion administrative du Congo est ailleurs ou simplement au sens propre, je dirais que la RDC est dirigée suivant la ligne de conduite des accords signés entre les politiciens congolais et les groupes rebelles étrangers à leur profit au détriment du peuple congolais. Les ennemis du Congo se servent des fils égarés et cupides pour mettre en exécution leur politique de sape et de destruction de la République démocratique du Congo.
Comment peut-on accepter d’intégrer les agresseurs de l’Etat Congolais dans les institutions administratives sous prétexte de l’application des accords de paix imposés par la communauté internationale et/ou, l’Occident-USA ? « Accord militaire de Lusaka, 10 juillet 1999 ; Accord politique de Pretoria/Accord Global et inclusif, 17 décembre 2002 ; Accord gouvernement-CNDP sur le brassage, Kigali, janvier 2007 suivi de l’Opération « Umoja Wetu » ; Accord gouvernement-CNDP sur le mixage, Goma, 23 mars 2009 ; Accord gouvernement-M23, Nairobi, 12 novembre 2013).
Malgré un semblant d’unification du territoire depuis l’entrée en fonction du gouvernement de transition (30 juin2003), la partie Est échappe toujours à l’autorité centrale de l’Etat car c’est le Rwanda et l’Ouganda qui y imposent leurs lois. Les massacres continuent à y être perpétrés au moment où la guéguerre fait rage à Kinshasa pour le partage du pouvoir. Les Congolais sont abandonnés à eux-mêmes ; ils sont laissés à la merci des bandes armées et des armées étrangères qui écument le territoire national.
Le peuple Congolais doit savoir qu’il n’y a pas eu plusieurs guerres depuis 1996, seulement une seule guerre en plusieurs phases commanditée par les euro-américains et les exécutants sont le Rwanda et l’Ouganda. L’insécurité, le désordre et le chaos perpétuel profitent aux « entrepreneurs de l’insécurité » ou aux réseaux mafieux internationaux, régionaux et locaux qui n’ont pas intérêt à ce qu’ils prennent fin. Et cette stratégie est censée faciliter le contrôle de la RDC et consolider davantage l’influence de l’occident-USA dans la région des Grands-Lacs. Et derrière les guerres actuelles, se cachent certains groupes tribaux ou ethniques épris par un souci obsessionnel de dominer les autres par la violence et la terreur. Et comme les occidentaux travaillent avec des agendas de longues années, les nouveaux leaders congolais doivent avoir une lucidité et une plus grande prudence d’anticipation avant de coopérer avec les acteurs extérieurs. Ils ont l’obligation de développer une stratégie de faire sortir le Congo dans une civilisation imposée à coups de canon.
En passant en revue l’Accord de paix du gouvernement Congolais-M23 à son article 5 et l’article 7 de l’accord de paix entre le Gouvernement Congolais et le CNDP, le gouvernement Congolais s’est engagé à décréter la partie Est de la RDC (Nord-Kivu, Sud-Kivu, Ituri, Haut-Ouele, Maniema et Tanganyika) comme étant une « Zone Sinistrée ». Ce qui signifie le « remplacement du pouvoir civile par le pouvoir militaire (Etat de siège) qui travaille à l’ordre des accords signés ».
A ce titre, la zone déclarée sinistrée devra jouir de :
(1). Un statut administratif particulier ;
(2). D’un plan de développement spécial ;
(3). D’une large autonomie fiscale et financière ;
(4). D’un concept opérationnel particulier pour sa sécurisation ;
(5). D’un programme spécifique de sécurisation pour la concrétisation des différents Accords régionaux, notamment :
- Le Pacte sur la Sécurité, la Stabilité et le Développement dans la Région des Grands Lacs signé à Nairobi, le 15 Décembre 2006 ;
- L’Accord-cadre pour la Paix, la Sécurité et la Coopération pour la République Démocratique du Congo et la Région, signé à Addis-Abeba le 24 Février 2013.
En revenant sur l’Accord de LEMERA signé le 23 Octobre 1996, l’article 2 stipule que le « sol et le sous-sol Congolais appartient à l’AFDL ». Qui dit AFDL, j’imagine que les Congolais doivent savoir qu’ici on parle du Rwanda, de la Tanzanie et de l’Ouganda. Le président Rwandais Paul Kagame ou Yoweri Museveni n’ont pas besoin de rattacher la « zone sinistrée » au Rwanda, plutôt il a déjà conquis ou réussi par sa gestion à travers d’une administration satellite. Même la constitution de la RDC à son article 215 souligne que « les traités et les accords internationaux régulièrement conclus ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois nationales de la RDC. Et à l’article 217 de la constitution, il est souligné que « la République démocratique du Congo peut conclure des traités ou des accords comportant un abandon partiel de son territoire en vue de promouvoir l’unité africaine ».
Si le sol et le sous-sol Congolais appartient à l’AFDL et qu’une rétribution spéciale sera donnée aux alliés de l’AFDL dont le Rwanda, la Tanzanie et l’Ouganda, je peux conclure que la balkanisation est effective au Congo Kinshasa. Ce qui reste à Paul KAGAME est de se faire accepter et assoir son leadership en RDC à travers un plan de développement spécial sous financement de la communauté internationale et de l’Union européenne.
Notes
(Remigius Kintu, « Sins of Omission, Apathy and American Agression in Africa», in UDC/Uganda Democratic Convention, 27 September 1997Michel Chossudovsky, « Rwanda: Installing a US Protectorate in Central Africa », in Global Research, 8 May 2003 ; Robert and Kathleen Krueger, From Bloodshed to Hope in Burundi. Our Embassy Years during Genocide. University of Texas Press. 1st edition, October 1, 2007 ; Charles Onana, Ces Tueurs Tutsi. Au Coeur de la Tragédie Congolaise. Paris, Editions Duboiris, 30 avril 2009 ; Robin Philpot, Rwanda and The New Scramble for Africa: From Tragedy to Imperial Fiction. Baraka Books, December 20, 2013 ; Noël Ndanyuzwe, La guerre mondiale africaine : la conspiration anglo-amércaine pour un génocide au Rwanda. Editions Sources du Nil, 15 juin 2014 ; Bucyalimwe Mararo Stanislas, Maneuvering for Ethnic Hegemony, op. cit. novembre 2014), tout doit être mis en oeuvre collectivement au sein des peuples qui en sont victimes (Ouganda, Rwanda, Burundi et RDC) pour dénoncer avec véhemence, combattre acharnement cette politique hégémonique tribale/ethnique d’un autre âge et la culture du mensonge et de la violence qui leur sert de support (Raymond Mutuza Kabe, « L’idéologie hima-tutsi et la crise des Grands Lacs », in La crise dans la sous-région des pays des grands lacs africains: état de la question et perspectives de paix. Actes du premier symposium international de l’Université de Kinshasa, Volume I (Presses Universitaires de Kinshasa, 2009) ; Balibutsa Maniragaba, Une archéologie de la violence en Afrique des Grands Lacs. Libreville, CICIBA, 2000).