Rwanda: Kagamé accusé d’influencer la justice dans l’affaire Rusesabagina

Paul Rusesabagina a été condamné lundi à 25 ans de prison pour terrorisme par un tribunal de Kigali. Face à sa condamnation, sa fille accuse le président rwandais Paul Kagamé d’avoir influencé la décision de justice alors que la Belgique affirme qu’il “n’a pas bénéficié d’un procès juste et équitable.

Le verdict de condamnation qui frappe l’opposant rwandais Paul Rusesabagina, reconnu coupable de “terrorisme” lundi à Kigali, a été “décidé” par le président Paul Kagame, a dénoncé une des filles de l’accusé, Carine Kanimba, interrogée en Belgique.

Je ne suis pas surprise du tout, on s’attendait exactement à ça. Kagame a kidnappé mon père, puis est allé à la télévision dire qu’il avait du sang sur les mains. Les juges ont décidé ce que le dictateur voulait qu’ils décident“, a affirmé Carine Kanimba peu après l’annonce de la condamnation.

C’est un procès de juges aux ordres“, a renchéri à ses côtés Me Vincent Lurquin, avocat belge de M. Rusesabagina en réitérant son appel à un transfèrement de son client en Belgique, pays dont il a aussi la nationalité.

“Un procès politique”

Depuis le début de la procédure, la famille et les soutiens de l’ancien hôtelier dont l’histoire a inspiré le film “Hôtel Rwanda” dénoncent “un procès politique” mené à l’issue d’une arrestation “illégale”, fin août 2020 à Kigali. PaulRusesabagina, qui vivait depuis 1996 en exil aux Etats-Unis et en Belgique, a été arrêté dans des circonstances douteuses par la police rwandaise à sa descente d’un avion qu’il pensait à destination du Burundi.

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Incarcéré depuis plus d’un an, l’ancien directeur de l’Hôtel des Mille Collines à Kigali était jugé pour son soutien au Front de libération nationale (FLN), groupe rebelle accusé d’avoir mené des attaques meurtrières au Rwanda en 2018 et 2019.

Le tribunal conclut que le rôle de Rusesabagina dans la création du FLN, la fourniture de fonds aux rebelles et l’achat de moyens de communication pour les rebelles constituent tous le crime de commission de terrorisme“, a déclaré Béatrice Mukamurenzi, une des trois juges du tribunal de Kigali.

On a l’impression que c’est un jugement qui aurait pu être écrit la veille du début du procès“, a commenté Me Lurquin l’avot de M. Rusesabagina, qui avait été expulsé le 21 août du Rwanda après avoir été empêché de rendre visite à son client en prison. Il a jugé “probable” que M. Rusesabagina fasse appel de sa condamnation, à condition d’obtenir des garanties sur la possibilité de se défendre.

La Belgique et les États-Unis réagissent

Face à l’annonce de la condamnation de Paul Rusesabagina qui a aussi la nationalité belge, Sophie Wilmès, la ministre belge des Affaires étrangères a dénoncé dans un communiqué “malgré les appels répétés de la Belgique à ce sujet, force est de constater que M. Rusesabagina n’a pas bénéficié d’un procès juste et équitable; particulièrement en ce qui concerne les droits de la défense“.

La présomption d’innocence n’a pas été respectée“, et “ces éléments de facto remettent en question le procès et le jugement” a t-elle ajouté.

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Alors que Mme Wilmès devait s’entretenir avec son homologue rwandais, Vincent Biruta, à New York cette semaine, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, le Rwanda a annulé la rencontre ce mercredi.

Quant aux Etats-Unis, le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price a indiqué lundi, que “l’absence de garanties d’un procès juste remet en cause l’équité du verdict“.

Nous sommes préoccupés par les objections soulevées par M. Rusesabagina sur l’absence d’accès confidentiel et sans entrave à ses avocats ainsi qu’aux documents légaux le concernant, et par le fait qu’il n’a initialement eu accès à aucune défense“, a poursuivi le porte-parole du département d’Etat. Paul Rususesabagina détient un permis de résidence permanente aux Etats-Unis.

By Ndea Yoka