En plus de Centrafrique, Kagame parvient à vendre aussi ses soldats au Mozambique et c’est la France de Macron qui va payer par le truchement de la multinationale Total.

Comment Paul Kagame vend en location les soldats de son armée à certaines puissances pour servir comme “mercenaires” partout où elles ont des intérêts mais ne veulent pas envoyer leurs soldats [Série 7].

 Une armée pléthorique

Le Rwanda, sur lequel règne Paul Kagame depuis 1994, a une superficie de 26.338 km2 avec une population d’environ 10 millions d’habitants. Il entretient sur ce territoire une armée de plus de 100.000 hommes de troupe, encadrés par près d’une centaine de généraux d’active, si on y ajoute ceux de la Police.

A titre de comparaison, la Belgique qui a presque la même superficie et le même nombre d’habitants mais avec beaucoup plus de ressources financières, n’a jamais entretenu une armée avec de tels effectifs. La Belgique étant membre de l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord) depuis la création de ce traité de défense en 1949, même au plus fort de la guerre froide quand elle avait un Corps d’Armée, le 1 BE Corps, stationné en Allemagne avec deux divisions, ses effectifs n’ont jamais dépassé 70.000 hommes. De même, le nombre de généraux en exercice était de 39, nombre fixé par une loi organique. Aujourd’hui, après les réaménagements successifs depuis la fin la chute du mur de Berlin, l’Armée belge, toutes composantes confondues (Terre, Air, Mer) n’atteint même pas 40.000 hommes, soit un tiers de l’armée de Paul Kagame au Rwanda.

Contraintes et risques

Il est donc évident que le dictateur du Rwanda Paul Kagame, pour entretenir une telle armée aussi surdimensionnée avec les ressources du Rwanda que l’on connaît, même en pillant la RDC voisine, il reste toujours sous contraintes. Il doit au moins payer à ses milliers de soldats leur solde et cela régulièrement. Il doit aussi les équiper et même, on l’oublie souvent, les occuper dans la vie de tous les jours. Sinon alors, les risques seraient énormes et catastrophiques pour Paul Kagame et son régime dictatorial : pillages et banditisme organisé, mutineries pouvant aller au renversement de la clique au pouvoir ou tout au moins à semer le chaos dans le pays.

Astuces pour s’en sortir

Connaissant les problèmes auxquels il est confronté, les puissances parmi lesquelles celles ayant créé Kagame et l’ont placé à la tête du Rwanda en 1994, volent donc chaque fois à son secours quand il est acculé. C’est ainsi que pour s’en sortir dans l’entretien et le contrôle d’une armée aussi pléthorique, ces puissances conseillent à Kagame de leur vendre temporairement ses soldats pour qu’ils aillent se déployer dans des théâtres d’opération où ces puissances ont des intérêts mais où elles ne voudraient pas déployer leurs propres soldats. En fait des “mercenaires” détachés par Kagame contre payement pour accomplir des missions des puissances qui le paient.

Dans ce marché, Paul Kagame est triplement gagnant. D’abord, c’est fait contre monnaie sonnante et trébuchante. On dirait, une sorte de “pots de vin”. Ensuite, son armée envoyée comme “mercenaires”, est payée et équipée par ces puissances lui écartant ainsi la menace des mécontentements ou de mutineries pour non-paiement de solde ou manque d’équipement. Enfin, sur le plan médiatique, sa réputation en sort très rehaussée et son armée qualifiée d’exceptionnelle en Afrique et au monde d’autant que ces médias qui répandent cette propagande sont contrôlés par les puissances qui concluent ce marché de mercenariat avec Paul Kagame.

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Une remarque pour ceux qui auraient tendance à fantasmer et à penser que les autres dirigeants des pays africains ne seraient pas aussi inspirés que Paul Kagame pour conclure de tels marchés. Un tel marché est impossible dans aucun autre pays. Quand Paul Kagame doit envoyer des troupes à l’étranger, il n’a de compte à rendre à personne même pas à ce qui fait office “des élus de la Nation” qu’est le Parlement. Ces soi-disant élus ne sont même pas informés et ne doivent surtout pas commenter le déploiement de l’armée à l’étranger. Même les ministres n’en sont même pas informés en Conseil du Gouvernement. Celui qui oserait poser la question là-dessus ou qui en parlerait en s’écartant du communiqué officiel de Paul Kagame, non seulement risquerait d’être limogé mais surtout la prison pour “être ennemi du pays”. Bien plus, même les familles des soldats qui trouveraient la mort au cours de ces opérations extérieures ne sont pas autorisées à en parler.

Les cas récents et d’actualité – En République Centrafricaine (RCA)

Depuis la crise en Centrafrique et l’envoi des Casques bleus de l’ONU dans ce pays, un contingent de militaires rwandais fait partie de cette mission dite MINUSCA. Mais le monde fut surpris d’apprendre en 2020 que le Rwanda de Paul Kagame venait d’envoyer d’autres troupes en Centrafrique non pas sous le drapeau de l’ONU mais directement opérant avec l’armée régulière de Centrafrique. Les Centrafricains furent les premiers à tomber dans la confusion et jusqu’à ce jour ils ne savent pas quel soldat rwandais est du contingent de l’ONU ou est un allié des troupes gouvernementales surtout que des heurts éclatent souvent entre ces deux forces du fait que les premiers sont soumis aux règles d’engagement définies par l’ONU, tandis que les seconds n’en sont pas tenus.

Mais alors, que s’est-il passé ? Depuis 2019, une présence de militaires ou paramilitaires russes a été signalée dans l’armée régulière de Centrafrique et même dans l’entourage immédiat du président Faustin Archange Touadéra. Quelques temps après, la Russie confirma, même devant le Conseil de Sécurité de l’ONU, que sur base des accords bilatéraux entre les deux Etats, des instructeurs russes étaient déployés en Centrafrique pour former son armée.

Quoique pouvant se renseigner sur les activités des Russes en Centrafrique en utilisant la technologie de pointe, le Pentagone était et reste d’avis que rien ne peut remplacer la présence physique des hommes sur le terrain pour faire la filature et suivre au jour le jour les activités d’autres troupes jugées “ennemies ou contre leurs intérêts ”. Or, les Etats Unis ne veulent pas déployer leurs hommes en Centrafrique, car même dans des théâtres d’opération beaucoup plus stratégiques et sensibles où ils s’étaient engagés, le processus de retrait est en marche. C’est alors que les spécialistes du Pentagone et de la CIA en la matière, eurent le coup de génie d’introduire Paul Kagame à Faustin Archange Touadéra, deux hommes qui ne se connaissaient pas et que tout séparait.

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Paul Kagame était ravi qu’il allait être payé comptant pour les hommes qu’il allait lui envoyer mais que ces soldats aussi allaient être payés et équipés par les USA et ensuite envoyés en Centrafrique avec pour mission secrète d’épier tout fait et geste des Russes et de rendre compte au Pentagone. Faustin Archange Touadéra était aussi ravi que les fameux Inkotanyi rwandais étant de son côté, il ne risque plus rien de la part de ses opposants ou rebelles, allant même jusqu’à leur confier sa sécurité comme sa garde rapprochée en remplacement des militaires centrafricains jugés moins sûrs. Et l’Oncle SAM, sans déployer un seul GI dans cette lointaine Centrafrique, parvient à suivre instant par instant toute activité des Russes dans ce pays mais aussi à avoir une main mise sur son président par l’entremise de Kagame.

Avec cet éclairage, on comprendra certains faits ou allégations qui semblaient inexplicables ou tout au moins incompréhensibles. Ainsi quand la presse occidentale, les ONG connues et même certaines instances de l’ONU, parlent des instructeurs russes en Centrafrique, ils utilisent le terme de “mercenaires’’. Quand on sait que ce contingent russe est en Centrafrique avec exactement les mêmes sortes d’accords qui ont justifié l’envoi d’un contingent rwandais aussi en Centrafrique, mais que seul le contingent russe est qualifié de “mercenaire” alors qu’il opère côte à côte avec celui du Rwanda jamais qualifié de “mercenaire”, on se pose des questions.

Les mêmes ONG et autres “Experts de l’ONU” accusent le contingent des instructeurs russes en Centrafrique et dans une moindre mesure l’armée centrafricaine, d’exactions et de violations flagrantes des Droits de l’Homme. Mais pour le contingent rwandais, c’est “motus et bouche cousue” alors qu’ils opèrent ensemble sur le terrain avec les troupes de l’armée régulière du gouvernement centrafricain qu’ils sont censés encadrer et appuyer au combat.

Mais maintenant que l’on sait que c’est justement le contingent rwandais qui établit (sur demande des USA et des ONG pro-américaines et anti-russes) ces rapports accusant les Russes pour les accabler et que même les rwandais commettent eux-mêmes certaines exactions pour les imputer à leurs  “partenaires” sur le terrain que sont les russes, tout devient clair.

Et chacun des protagonistes se considère comme gagnant ! Mais sûrement qu’il y aura un dindon de la farce. L’avenir nous le dira.

Au Mozambique

Tout récemment, plus précisément le 09 juillet 2021, Paul Kagame a annoncé officiellement avoir envoyé des troupes au Mozambique. Ceci dans le cadre bilatéral et pas sous le drapeau de l’ONU ou de la SADC. En fait exactement le même scénario comme en Centrafrique.

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Mais dans le cas du Mozambique, c’est une autre puissance qui paie Kagame et loue les services de ses soldats vendus comme “mercenaires”. Rappelons que fin mars 2021, un groupe armé a effectué une attaque sur Palma, le chef-lieu de la province de Cabo Delgado à l’extrême Nord du Mozambique. Cette attaque a surtout été médiatisée car elle a aggravé la situation humanitaire mais surtout provoqué l’arrêt du projet gazier géant piloté par le groupe français TOTAL sur la péninsule d’Afungi.

Ayant investi des milliards dans ce projet, le groupe Total et l’Etat français n’entendent pas l’abandonner. Mais ils exigent à l’Etat mozambicain des garanties de sécurité de la zone. La France ne voulant pas déployer des troupes en Afrique australe alors qu’elle est suffisamment occupée au Sahel, le groupe Total serait prêt à payer des troupes d’autres pays (mêmes des mercenaires) mais agissant, non pas au sein des organisations régionales, mais sous prétexte d’accords directs bilatéraux avec le Mozambique qui viendraient sécuriser la zone et permettre au projet gazier de Total d’aboutir. C’est alors qu’Emmanuel Macron, le nouvel ami de Paul Kagame, sûrement au courant du coup des Américains en Centrafrique, a suggéré au président du Mozambique de demander à Paul Kagame des troupes qui occuperaient Cabo Delgado pour permettre à Total d’y opérer et ceci contre payement (des royalties, le versement de la solde de ses troupes et le payement de leurs équipements).

Et voilà donc, en plus de Centrafrique, Kagame parvient à vendre aussi ses soldats au Mozambique et c’est la France de Macron qui va payer par le truchement de la multinationale Total. Et en plus, la Centrafrique et le Mozambique doivent aussi verser des sommes de dollars ou d’autres payements en nature (minerais par exemple).

Pour terminer, nous dirons que la propagande et les médias de ces puissances désinforment à propos de ce marché inique et cynique entre eux et le dictateur Paul Kagame, ce qui ne devrait plus impressionner personne. Parler de Paul Kagame qui, comme panafricaniste, enverrait ses troupes pour secourir ses frères africains en difficulté, alors qu’il est payé et sous-traité par les mêmes puissances qui veulent la domination de l’Afrique, c’est le comble de l’aveuglément.

Et voilà le type de “leader” que certains intellectuels ou plutôt “idiots utiles” francophones de l’Afrique de l’Ouest souhaiteraient qu’il vienne régner chez eux ou alors en copier le modèle pour l’imposer à leurs peuples.

 Le prochain article de la série parlera notamment de comment et pourquoi Paul Kagame a interdit, d’un coup, l’importation, la vente et le port des habits de secondes mains (friperies, isekeni ou caguwa en kinyarwanda) pour faire tomber en faillite les commerçant hutu de Nyanza et de Gitarama qui s’étaient enrichis par ce secteur ; surtout pour donner le monopole du marché de vente d’habits au Rwanda à la compagnie proche de la clique au sommet du pouvoir.

A suivre donc.

Emmanuel Neretse