Génocide 1972 contre les Hutus: Quelques témoignages

KAGIMBI Salvator est un tutsi. Il nous livre le témoignage entendu de la bouche de son père qui était travailleur du service de National des renseignements en 1972. Il se limitera ici sur comment le coup a été monté pour justifier l’assaut contre les hutu.

« En date du 20/04/1972, M. Arthémon SIMBANANIYE, le Major Albert SHIBURA et le patron de la documentation de l’époque ont réuni les cadres et agents de ce Service pour mettre le point sur le plan d’élimination de toute la race Hutu sur la carte du Burundi.

M. SIMBANANIYE a expliqué, qu’il serait difficile de convaincre tous les Tutsi que tous Hutu doivent mourir si on ne leur montre pas que ces derniers constituent une menace pour eux. Il a encore expliqué qu’il serait difficile de convaincre la communauté internationale sur la raison de ce “nettoyage” si le gouvernement ne parvenait pas à justifier que l’élimination de la race hutu était une pure victoire du gouvernement de l’époque contre les rebelles Hutu. Il a renchéri que si on expliquait au peuple burundais qu’une rébellion Hutu a attaqué et tué les familles tutsi, bon nombre de Hutu, si pacifique soient-ils, allaient bel et bien comprendre que toutes les personnes qui seraient arrêtées sont des récalcitrants (abamenja) et que par conséquent il serait justifiable devant les autres Hutu que leurs confrères soient arrêtées et emprisonnées.

Pour réussir tout cela, il fallait sacrifier certaines familles tutsies du sud afin de les coller aux Hutu et essayer de convaincre tous les Tutsi, les hutu et même la communauté internationale que le pays se trouve en situation de guerre dont on ne saurait limiter les dégâts ».

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Dans la suite de son récit, KAGIMBI Salvator précise la mission donnée à son père et d’autres agents de l’armée et du service national de renseignement pour commencer le génocide.

  1. Mon père (qui en souffre beaucoup) et d’autres, ont obtenu la mission d’aller recruter quelques mai mai (mai mulele) du Congo avec lesquels ils (les mai mulele et les agents du service national de renseignement burundais) ont attaqué, tué et sacrifié certaines familles tutsi du sud du pays pour justifier l’intervention de l’armée et permettre la justice de l’époque à réprimer les “faux” auteurs (“faux auteurs” parce que les massacres ont été commis par les tutsi contre les autres tutsi mais accolés aux hutu) ;
  2. Un communiqué de presse est alors passé à la radio faisant état des attaques commises par la rébellion hutu, appuyé par les mai mulele et commandé par le roi Charles NDIZEYE (qui avait été rapatrié de l’Uganda en cachette et emprisonné au camp commando de Gitega) ;
  3. Le roi Charles NDIZEYE a été alors assassiné dans cette nuit même, à partir du camp commando de Gitega ; et le gouvernement a commandité un assaut contre tous les hutu partout où ils se trouvaient sur le territoire burundais ;
  4. Un conseil de guerre (où siégeait l’ancien président Jean-Baptiste BAGAZA) s’est réuni pour incriminer tous les fonctionnaires de l’Etat d’ethnie Hutu comme étant les ténors des massacres des Tutsi au sud du pays. C’est d’ailleurs pour cela que, tout Hutu qui voyait son confrère arrêté, il croyait aux propos du gouvernement que ce Hutu était un “umumenja” càd un ” traitre”, “quelqu’un qui a commis l’irréparable et méritait la mort” ;
  5. Tous les Tutsi ont alors, depuis de sommet de l’Etat, les corps de l’armée et de sécurité, l’administration étatique et non étatique, les étudiants, élèves et écoliers, jusqu’aux simples paysans été mobilisés pour identifier, lister et livrer à l’armée tout être Hutu afin qu’il soit tué ;
  6. Mon père croit que plus de 500 000 Hutu ont été tués dans cette campagne initiée par le gouvernement du Capitaine Michel Micombero où, jusqu’à présent, même les Hutu croient qu’il existe des Hutu qui ont attaqué et tué les familles Tutsi au sud du pays ».
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Julien Ntarugera