L’ONG Human Rights Watch accuse, dans un rapport, des officiers supérieurs de RDC d’avoir recruté clandestinement au moins 200 anciens rebelles du M23. Des rebelles exilés en Ouganda et au Rwanda depuis leur défaite dans l’est de la RDC en novembre 2013, recrutés pour « étouffer » les manifestations anti-Kabila de décembre 2016, et « protéger » le chef de l’Etat dont le mandat venait d’expirer. La répression qui, selon l’ONG, a coûté la vie à au moins 62 personnes entre le 19 et le 22 décembre 2016, était donc préméditée, assure l’ONG. Pour rédiger ce rapport, intitulé « Mission spéciale », HRW dit avoir travaillé 11 mois, dans quatre pays (Rwanda, Ouganda, Belgique et RDC) et mené plus de 120 entretiens, donc 21 avec d’anciens combattants, commandants et leaders politiques du M23.
C’est en octobre 2016 que la RDC se serait tournée vers ses anciens ennemis, alors que « la pression sur Kabila s’intensifiait », affirme Human Rights Watch. Selon l’ONG, des officiers supérieurs des forces de sécurité se seraient alors rendus en Ouganda et au Rwanda dans des camps militaires et de réfugiés, pour recruter clandestinement les anciens rebelles en leur promettant nourriture, dollars, protection, et même parfois réintégration dans l’armée. Le tout en collaboration avec certains responsables du mouvement M23.
Une fois transférés en RDC, les anciens rebelles auraient été déployés dans trois villes, Kinshasa, Goma et Lubumbashi, équipés d’armes et d’uniformes neufs et intégrés dans la police, l’armée, la Garde républicaine. Plusieurs témoins cités dans le rapport disent avoir reçu des instructions très explicites pour que l’un d’eux fasse « la guerre à ceux qui voulaient menacer le maintien au pouvoir de Kabila ». « Nous avons reçu l’ordre de tirer immédiatement à la moindre provocation des civils », explique un autre.
Pas de commentaires des autorités congolaises
La plupart seraient rentrés dans leur pays d’exil fin décembre-début janvier, avant que d’autres, « au moins 200 » selon l’ONG, ne soient recrutés tout aussi secrètement entre mai et juillet 2017, affirme HRW. Ils auraient été envoyés à Kisangani pour y suivre une formation, censée les préparer à de futures opérations spéciales.
Selon Human Rights Watch, les autorités ougandaises ont nié toute implication dans ces recrutements. Elles ont même nié en avoir eu connaissance. Les autorités rwandaises et congolaises, elles, n’ont pas répondu officiellement à l’ONG. Le leader de la branche politique du M23, Bertrand Bisimwa, aurait en revanche confirmé que des « officiers des forces de sécurité avaient recruté d’anciens combattants du M23 », mais assuré qu’il ignorait à quelles opérations ils étaient associés une fois en RDC.
A RFI, le porte-parole du gouvernement congolais a déclaré ne pas vouloir réagir à un travail « très peu professionnel » et qui relève davantage de la « politique politicienne ».